Ce qu'est la sobriété
 
Qu'est-ce que l'attention, appelée aussi sobriété ?
 
Il y eut au XVIII° siècle une traduction russe de la philocalie, qui est le recueil des textes de la tradition hésychaste, et dont le titre signifie "amour du beau" par Païssy Vélitchokovsky. Il intitula la sienne "dobrotoloubié" qui veut dire "amour du bien".
Cette traduction connut un succès jusque chez les simples croyants et fit se répandre en Russie la prière du cœur comme une bienheureuse épidémie.
Le XIX° siècle connut une résurrection de ce formidable engouement pour la prière du cœur, dont l'un des acteurs fut l'évêque Ignace Briantchaninoff.
Il fut un très remarquable, quoique austère, pédagogue de cette forme de prière.
 
Briantchaninoff nous enseigne, selon Emile Simonod, qu'il est deux sortes d'attention, ou plus précisément deux moments dans l'attention qui se rejoignent.

"Il y a l'attention que l'on porte à chacun des mots de l'invocation [=prière monologique] au fur et à mesure que celle-ci est prononcée, à haute voix ou mentalement, mais il y a aussi l'attention (ou sobriété) qui, dans le combat spirituel livré contre les passions, joue en quelque sorte le rôle de veilleur, de sentinelle empêchant les pensées de venir troubler celui qui prie.
Il est évident que la première forme d'attention conduit à la seconde si elle est appliquée avec grand soin et persévérance."
(Emile Simonod, "La prière de Jésus selon l'évêque Ignace Briantchaninoff", éditions Présence, 1976)
 
Ainsi, selon la première acceptation du terme "attention", la prière du cœur produit-elle son fruit à la condition qu'on prête une vigilance très attentive à chacun des mots de la prière au fur et à mesure qu'on la récite (en prenant cependant bien garde de ne jamais rien y déposer d'intellectuel ou d'affectif) : : on fait simplement attention à la prière.
Lorsqu'on se consacre à n'importe quelle tâche, comme par exemple de faire à manger ou de bricoler, on fait naturellement attention à ce qu'on fait, sans quoi on casse la vaisselle ou on fait une erreur dans son travail.
Il s'agit dans la prière du cœur très exactement de la même sorte d'attention.
Il faut tout simplement s'appliquer, c'est à dire mettre à contribution toutes les facultés de notre personne dans le travail. Ainsi est-il excellent.
 
Mais, lisons-nous dans le texte cité, cette première forme de l'attention conduit à la vigilance quant aux pensées, qui est la deuxième forme de l'attention, qu'on essaie de conduire avec le secours de l'Esprit.
C'est que se développe petit à petit la capacité, d'autant plus grande que la prière continuelle s'est approfondie, de voir ses pensées naître et que cette conscience permet d'en réfréner le cours.
Cette seconde forme de l'attention, liée à la première, est la lutte contre l'imagination dispersante, et que les pères appellent la lutte contre les passions. On parle de pratiquer la "sobriété" ou de "garde du cœur".
     
   
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